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⚡️ 🌍 Loi Gremillet sur l’énergie : un rejet salutaire, après une séquence politique accablante

Le rejet massif par l’Assemblée nationale de la proposition de loi dite « Gremillet » marque la fin d’une séquence politique aussi inquiétante que révélatrice. Cette séquence restera comme un moment de bascule. Un épisode où, sous couvert de programmation énergétique, une alliance réactionnaire a tenté d’imposer une vision climatosceptique, pro-fossiles et anti-renouvelables, en contradiction totale avec l’urgence écologique et les attentes du pays.

Pour comprendre ce qu’il s’est passé, il faut revenir sur les origines de cette proposition de loi.

Depuis trois ans, le climat et l’énergie ont progressivement disparu de l’agenda politique des  différentes versions de la Macronie qui se sont succédé au gouvernement. De ce fait, ils ont systématiquement refusé de présenter une loi de programmation sur l’énergie et le climat pourtant prévue par l’article L.100-1 A du Code de l’énergie. Une obligation légale essentielle pour donner un cap clair à la planification énergétique du pays.  C’est dans cette même veine que le gouvernement Bayrou a choisi  de publier par décret une PPE (programmation pluriannuelle de l’énergie) sans débat parlementaire digne de ce nom.

Mais face à nos alertes répétées sur ce manquement démocratique et climatique, le gouvernement a fini par reculer… non pas par volonté, mais sous la menace politique. C’est en réponse à l’annonce d’une motion de censure portée par Marine Le Pen que l’exécutif s’est précipité pour reprendre une proposition de loi du sénateur LR Alain Gremillet. Un texte tourné vers le passé, truffé de dispositions dogmatiques et techno solutionnistes sur le nucléaire ou le captage-stockage de carbone, et quasi-muet sur les énergies renouvelables, la sobriété ou l’efficacité énergétique, pour mieux et moins consommer.

En bref, un texte incapable de répondre à l’urgence climatique misant tout sur le prolongement hypothétique de nos centrales nucléaire existantes et la construction des nouveaux EPR2. Un pari qui nous ferait dépendre plus des fossiles, et ferait inéluctablement flamber nos factures énergétiques. Aucun objectif chiffré pour les filières des énergies renouvelables, déjà très ébranlées par le manque de soutien du gouvernement, et des tentatives répétées pour faire disparaître la rénovation énergétique et thermique des logements. Le travail parlementaire avait permis de revenir à un texte plus raisonnable. En effet, lors de son examen en commission des affaires économiques, la proposition de loi a été en partie rééquilibrée. Les dispositions sur le nouveau nucléaire ont été retirées et les quelques mesures relatives aux énergies renouvelables ont été préservées. Consciente des enjeux techniques, industriels et climatiques, une majorité de fond s’était dessinée. Une majorité, de la gauche au centre du spectre politique, sérieuse et désireuse de construire un chemin de transition énergétique réaliste.

Mais cet équilibre précaire n’a pas résisté à l’examen en hémicycle. Là, sous l’impulsion de la droite et de l’extrême-droite, le texte a été méthodiquement transformé en véritable pamphlet climatosceptique. La relance absurde de la centrale Fessenheim a été remise sur la table. Une relance, qui de l’aveu même de la filière nucléaire, est impossible. Les objectifs de rénovation énergétique, pourtant essentiels pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre et protéger les millions en français qui vivent dans des passoires thermiques, ont été supprimés. Et surtout, un moratoire insensé sur l’éolien et le solaire a été adopté. Un moratoire qui s’attaque frontalement aux deux piliers de la production électrique décarbonée les plus rapides à déployer, les plus créateurs d’emplois, les plus soutenables et les moins chers..

Un tel choix, c’est aller à rebours des scénarios du GIEC, qui rappellent tous, sans exception, qu’il est impossible d’atteindre nos objectifs climatiques sans un développement massif des renouvelables. Stopper ces filières, c’est relancer les fossiles, plomber les factures, et mettre en péril des milliers d’emplois. C’est aussi offrir une victoire idéologique à une extrême droite qui rêve d’un retour à l’âge fossile, au mépris des réalités physiques, économiques et climatiques.

Mais comment a-t-on pu en arriver là, me direz-vous, après une séquence en commission relativement sérieuse ? C’est bien l’absence totale de vision du gouvernement, qui a ouvert la voie à ce naufrage. Refusant d’assumer ses responsabilités en présentant une véritable loi de programmation, l’exécutif a préféré s’abriter derrière une proposition de loi brouillonne portée par les Républicains au Sénat. Et pour ne pas froisser leurs partenaires, les macronistes ont laissé les forces les plus rétrogrades de l’hémicycle, y compris dans ses propres rangs, réécrire le texte. Ce n’est qu’à la dernière minute, face à l’indignation et la mobilisation des acteurs de la transition, des ONG, des collectivités et des filières industrielles, que le bloc macroniste s’est ressaisi à la hâte, en votant finalement contre un texte qu’il avait lui-même permis de mettre à l’ordre du jour.

Le texte a finalement été massivement rejeté. Ce rejet est une victoire pour le climat et la raison. Mais il ne saurait faire oublier la gravité de ce qui s’est joué ces derniers jours : un renoncement assumé, une tentative de réécriture idéologique de notre politique énergétique, et une absence dramatique de vision.

Cheffe de file pour le groupe Écologiste et Social, j’ai tenté de tenir bon face à cette tentative de sabotage climatique et énergétique. J’ai été, tout au long de cette séquence, en première ligne face à la vague de désinformation, face au déni énergétique, face aux pires délires climato-sceptiques, face aux attaques et insultes de l’extrême-droite. J’ai défendu, amendement après amendement, une trajectoire énergétique réaliste et ambitieuse, respectueuse du climat, des territoires et des citoyennes et citoyens.

Ce combat n’est pas terminé et il est temps que le gouvernement retrouve sa boussole énergétique et climatique. Il est temps que les parlementaires macronistes prennent enfin leurs responsabilités. Car ce qui est en jeu, ce n’est pas une bataille partisane. C’est notre avenir commun !

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