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Élections aux Pays-Bas : l’espoir tient bon !

Hier, les Néerlandais·es étaient appelé·es aux urnes pour des élections législatives anticipées. Ce scrutin faisait suite à la chute, en mai dernier, de la coalition gouvernementale provoquée par le leader d’extrême droite Geert Wilders lui-même. Une manœuvre cynique destinée à revenir plus fort et à capitaliser sur le contexte politique.

Première enseignement : un pari perdu pour Geert Wilders

Son pari a échoué. Et c’est sans doute la première bonne nouvelle de ce scrutin. Le PVV (Partij voor de Vrijheid), sa formation politique, arrive en seconde position et perd 11 sièges, passant de 37 à 26 députés. Un revers important, tant symbolique que stratégique. Pendant toute la campagne, les partis démocratiques ont multiplié les signaux clairs : non aux idées nauséabondes de l’extrême-droite. Personne ne gouvernera avec eux. Et c’est là le cœur du basculement : même en combinant les forces des trois partis d’extrême droite – PVV, Forum voor Democratie et JA21 – avec le soutien hypothétique du VVD (droite traditionnelle), Wilders est incapable d’atteindre la majorité absolue de 76 sièges. Il est isolé et ne pourra pas gouverner.

Le récit est moins spectaculaire, mais la digue a tenu

Ce constat peut sembler plus tiède que l’enthousiasme d’hier soir, où l’écart entre les libéraux du D66 et le PVV d’extrême-droite était plus large qu’aujourd’hui. Et pourtant, il est fondamental : les forces progressistes ont tenu, et le projet autoritaire de Wilders est stoppé net.

C’est peut-être cela qu’il faut retenir avant tout : ce n’est pas une victoire électorale pour la gauche, mais c’est une défaite politique pour l’extrême droite. Et dans le contexte actuel, c’est immense.

Une équation parlementaire encore floue

Aux Pays-Bas, la formation d’un gouvernement repose sur un système proportionnel intégral. Pour gouverner, il faut une coalition d’au moins 76 députés sur 150. Et à ce stade, aucune alliance naturelle n’émerge.

C’est dans ce contexte que Rob Jetten, leader de D66 (libéraux-progressistes), tente de construire une coalition de stabilité démocratique, incluant : D66, VVD (droite traditionnelle), GroenLinks-PvdA (écologistes et sociaux-démocrates unis) et CDA (chrétiens-démocrates). Ce scénario totaliserait 89 sièges : une majorité solide, pro-européenne, démocratique. Elle marquerait une rupture nette avec l’instabilité alimentée ces dernières années par l’extrême droite. Mais pour qu’elle voie le jour, le VVD devra renoncer à sa ligne dure actuelle, qui exclut toute alliance avec la gauche. Un revirement loin d’être acquis.

Par ailleurs, la démission de Frans Timmermans, chef de file de la gauche, survenue hier soir, crée une incertitude supplémentaire dans les équilibres politiques internes.

L’alternative serait une coalition réduite, fondée sur un socle de droite avec le soutien de JA21, petit parti d’extrême droite. Ce scénario serait fragile politiquement, mais surtout risqué démocratiquement. Il ferait une nouvelle fois entrer l’extrême droite, même marginale, au cœur du pouvoir, après des mois de confusion et de menaces sur l’État de droit.

Et maintenant ?

Aux Pays-Bas, la formation d’un gouvernement prend du temps. Un·e informateur·rice est nommé·e pour explorer les scénarios possibles, avant qu’un·e formateur·rice ne tente de bâtir une coalition. Une phase de négociation de plusieurs semaines s’ouvre donc, marquée par l’incertitude.

Mais une chose est sûre : l’extrême droite de Wilders n’est pas en position de gouverner. Elle est affaiblie, divisée, et contenue. C’est une victoire fragile, mais bien réelle. Et dans un contexte européen marqué par la normalisation de l’extrême droite, c’est une leçon politique majeure : les digues peuvent tenir – à condition qu’on les construise ensemble. 

Pour en savoir plus :

En juillet dernier, dans le cadre de mon engagement au sein du collectif La Digue, collectifs d’élu•es qui vise à défendre nos démocraties face à la menace de l’extrême droite, je me suis rendue aux Pays-Bas afin de rencontrer des chercheur•es, élues, et membres de la société civile qui se mobilisent, s’organisent et résistent face aux politiques menée par Geert Wilders et ses alliés. 

Pour lire mon rapport suite à ce déplacement : cliquez-ici !

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