Jeudi 3 avril, j’ai déposé une contribution à l’ultime consultation publique sur la version finale de la PPE3 — cette 3e Programmation pluriannuelle de l’énergie qui devrait dessiner, en théorie, notre avenir énergétique.
Le constat est sans appel : sous couvert de planification, ce texte est en réalité une régression maquillée, une impasse énergétique, aux antipodes des exigences climatiques et démocratiques.
Un décret sans loi et un avenir fragilisé
D’abord, en contournant l’exigence d’une loi de programmation énergétique prévue par l’article L.100-1 A du Code de l’énergie, le gouvernement impose une stratégie dénuée de débat parlementaire. Ce choix, en plus d’affaiblir la légitimité et la portée juridique de la politique énergétique, ouvre la porte à des décisions prises en coulisses et déconnectées des réalités scientifiques et techniques, économiques et territoriales.
Les énergies renouvelables : démolies à bas bruit
Sur le fond, les énergies renouvelables sont méthodiquement sapées. Les ambitions sur le solaire sont revues à la baisse par rapport à la version de novembre. L’éolien terrestre reste marginalisé. La géothermie oubliée. Et pour parachever l’attaque, le gouvernement vient de baisser les tarifs d’achat pour les installations photovoltaïques de moins de 500 kWc via la révision de l’arrêté S21. Un sabotage en règle, au moment même où à l’instar de tous nos voisins européens il faudrait accélérer, rassurer les filières et investir.
Une trajectoire énergétique faussée par une manipulation des chiffres
Et pour faire passer la pilule, le gouvernement manipule les chiffres, en augmentant artificiellement les facteurs de charge des renouvelables. En effet, d’un coup de baguette magique, le gouvernement fait croire qu’il est possible de produire plus d’électricité renouvelable, sans installer davantage de capacités de production. Un tour de passe-passe irresponsable, dangereux, qui conduit droit à un sous-dimensionnement structurel du parc électrique. Moins d’offres, c’est plus de tension sur les prix. Moins de capacités, c’est moins de sécurité d’approvisionnement. Moins de clarté, c’est moins de confiance dans l’électrification, pourtant pilier de la transition.
La relance nucléaire : une supercherie dont la ficelle est de plus en plus grosse
Enfin, la relance du nucléaire devient, devant la baisse programmée de l’apport des énergies renouvelables, le pilier de la politique énergétique française, comme si rien ne s’était passé, et faisant fi de toutes les réalités. Ni les retards, ni les dérapages budgétaires, ni les enjeux de sécurité et de sûreté, ni les incertitudes industrielles, économiques et climatiques ne semblent freiner un affichage plus qu’optimiste du gouvernement en matière nucléaire. L’EPR 2 de Flamanville est un fiasco, l’EPR 2 de Penly déjà repoussé à 2038, et pourtant, c’est sur cette technologie bancale que repose toute la stratégie énergétique française. Ce n’est plus un pari, c’est un aveuglement, un mensonge.
En définitive, cette PPE n’est pas une politique énergétique. C’est un écran de fumée. Elle recule là où il faudrait avancer, elle travestit les chiffres là où il faudrait dire la vérité, elle mise tout sur une technologie incertaine là où il faudrait bâtir la résilience. Nous appelons solennellement le gouvernement à revoir sa copie, à sortir du déni, à bâtir une stratégie lucide, renouvelable, démocratique.
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