Jeudi 24 novembre, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi visant à constitutionnaliser le droit à l’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG). Une étape essentielle pour inscrire dans la Constitution ce droit inaliénable des femmes à disposer de leur propre corps. Un moment extrêmement fort et puissant. Car si pour notre génération elle semble acquise, nous avons toutes et tous les récits de nos mères, de nos grand-mères, qui ont subit de nombreuses violences pour faire valoir leurs droits.
Si c’est déjà inscrit dans la loi grâce à la loi Veil, pourquoi une telle importance à l’inscrire dans notre Constitution ? Tout simplement parce que, comme l’ont illustré nos débats au sein de l’Assemblée ou du Sénat, celles et ceux qui seraient prompt à faire reculer nos droits sont bien présents en France. De plus, les reculs du droit à l’IVG un peu partout dans le monde peuvent nous faire craindre que cet acquis pourrait dans le futur être remis en question.
Un exemple récent aux Etats-Unis, où la Cour suprême américaine à restreint le droit à l’avortement. En effet, le 24 juin 2022, la Cour Suprême américaine décidait de revenir sur l’arrêt Roe v. Wade. Cet arrêt protégeait de facto “le droit des femmes” à avorter dans les 50 états du pays. Désormais, chaque État décide s’il autorise ou non le recours à l’avortement. Aujourd’hui, il ne reste légal que dans 24 États, 5 l’ont restreint ou ont exprimé leur souhait de le restreindre, 18 l’ont interdit ou vont le faire et son avenir reste incertain dans 3 États. Derrière, ce sont des milliers de personnes obligées de se déplacer dans un autre état pour y avoir accès ou de risquer leur vie en réalisant des IVG illégales, faute de moyens pour payer ce déplacement. Cette décision a prouvé qu’aucun droit – encore plus lorsqu’il s’agit du corps des femmes et des minorités – n’était jamais entièrement protégé.
Inscrire le droit dans l’IVG était donc indispensable et bien plus qu’un symbole : c’est rajouter des contraintes et difficultés supplémentaires pour le renverser. Il était donc urgent d’agir, notamment face à l’inquiétude grandissante des citoyen·ne·s.
D’abord portée par Mélanie Vogel (EELV) au Sénat, cette proposition de loi avait été rejetée à 17 voix près par une majorité de droite. Elle a ensuite été présentée lors de la niche parlementaire du groupe LFI à l’Assemblée. Chaque groupe parlementaire dispose du droit d’inscrire une proposition de loi lors d’une journée de débat. Les débats, notamment en commission des lois, ont été très durs et certains propos ont déshonoré notre hémicycle. Pour la droite et l’extrême droite ? Pas d’urgence à agir car ce droit ne serait pas menacé en France. Ils ont fait de l’obstruction parlementaire en allant jusqu’à proposer des amendements sans lien avec le sujet, comme la Procréation Médicalement Assistée (PMA) ou les étrangers. Un amendement pour renommer le texte “proposition de loi constitutionnelle visant à laisser croire que l’IVG serait remise en cause en France” a également été déposé. Une véritable preuve de leur mépris pour le droit des femmes. Ils nous ont ainsi démontré que les personnes qui menacent régulièrement le droit de l’IVG à travers différentes contraintes – que ce soit de durée ou de critères d’accès – sont les mêmes que celles qui s’opposent à sa constitutionnalisation. Somme toute, ils veulent garder les mains libres pour s’en défaire un jour !
Finalement, la proposition de loi a été adoptée dans une version qui permet à la fois de protéger le droit à l’avortement des femmes mais aussi des personnes trans. C’est donc une victoire historique et vecteur d’espoir pour toutes celles et ceux qui se battent encore aujourd’hui pour obtenir ou maintenir ce droit. J’ai été émue et fière ce jour là en votant pour cette proposition de loi, avec une grande pensée pour ma mère et ma grand-mère, qui elle, n’ont pas eu la chance d’être protégées par le droit dans notre pays.