Vendredi 3 février, j’étais l’invitée de France Info pour débattre, avec Raphaël Schellenberger, député Les Républicains, et Nicolas Goldberg, responsable Energie chez Colombus Consulting et Terra Nova, de la place du nucléaire dans le mix énergétique suite à la tenue d’un conseil de politique nucléaire présidé par Emmanuel Macron.
“Le nucléaire français est à la fois trop faible pour oser se soumettre à l’exercice démocratique et à la fois trop puissant pour devoir s’y plier”, rappelle Yves Marignac, chef du pôle expertise nucléaire et fossiles à l’Institut négaWatt. Or le nucléaire engage notre pays pour les décennies et siècles à venir.
Le choix de relancer ou non un programme nucléaire engage toute notre société et doit donc pouvoir être démocratiquement débattu. Mais le président de la République n’en a que faire. Au contraire, en réunissant ce 3 février, un Conseil présidentiel de la politique nucléaire, pour établir le calendrier de construction de réacteurs EPR 2, dont le concept n’est pourtant même pas encore validé, il avance à marche forcée, sans tenir compte des conclusions de la concertation nationale sur l’avenir énergétique ni celles relatives au débat public sur un programme de nouveaux réacteurs mené par la CNDP.
Sur France Info, j’ai dénoncé cette fuite en avant du Président dans le nucléaire, qui verrouille notre avenir énergétique.
En voulant imposer la technologie EPR comme pilier de notre stratégie énergétique, alors que nous ne savons pas la construire et qu’elle est extrêmement couteuse, le président de la République fait un pari hasardeux et irresponsable ! Pour rappel, aucun réacteur nucléaire EPR dans le monde ne fonctionne correctement aujourd’hui… En France, le seul chantier, lancé par EDF en 2007 à Flamanville, n’est toujours pas terminé. Il a connu et connait encore aujourd’hui une succession incroyable de retards, de larges dépassements de budgets, de malfaçons et même des tentatives de dissimulation des erreurs commises.
J’ai également soulevé sur France Info les problématiques qui s’accumulent sur notre parc nucléaire actuel. Des problématiques sensibles qui ne seront très certainement jamais résolues : accumulation des déchets radioactifs et saturation des piscines pour les entreposer, coûts phénoménaux du plan de maintenance des centrales aussi appelé Grand Carénage, malfaçons et phénomènes imprévisibles qui rendent nos centrales intermittentes et dangereuses (corrosion sous contraintes), risques pour les installations en temps de guerre, impact environnemental des centrales et leur vulnérabilité face au réchauffement climatique, investissements impossibles à anticiper pour le démantèlement des réacteurs…
En bref, alors que la fenêtre de tir pour endiguer le changement climatique se réduit à peau de chagrin, faire le choix du nucléaire pour la transition énergétique est une totale hérésie. Le seul modèle énergétique soutenable pour protéger nos concitoyens et le climat, c’est d’abord réduire nos consommations, et ensuite d’augmenter de manière significative le développement des énergies renouvelables. Tous les scientifiques en témoignent : les renouvelables produisent, déjà aujourd’hui et encore davantage demain, de l’énergie bien moins chère que celle issue du nucléaire.
Dans les années 70 j’ai visité plusieurs centrales nucléaires avec mon père qui était ingénieur à l’EDF. Il me disait alors » on ne peut se passer du nucléaire mais dans l’avenir il aura sans doute d’autres manières de produire de l’électricité » Il reconnaissait la problématique du traitement des déchets radioactifs. Ces autres moyens de production nous les avons maintenant, ne misons plus sur le nucléaire!